Albert-Marie : un artisan des mots

CŒURS AU CHŒUR DU MONDE

L'Amour sans frontière. Crédit photo : www.xboxygen.com - Eternal Hope.

COMPTINE DE TES YEUX

à Doriane de Z.

Dans tes yeux qui vont si loin

Deux vaguelettes de ciel

Rient, et sur mon cœur d’embrun

S’écoule un rayon de miel.

Dans tes yeux qui vont si loin

Je vois ton cœur qui se branche

Et qui s’enracine au mien

Comme on prend une revanche.

Dans tes yeux qui vont si loin

Fusent des pointes de feu.

Quand tu n’es plus mon satin

Je me sens tout loqueteux.

Dans tes yeux qui vont si loin

Vacille un croissant de lune,

L’image de ton destin

Sur des plages d’infortune.

Dans tes yeux qui vont si loin

Résonne, désespéré,

Un cri étouffé sans fin

De mouette pourchassée.

Dans tes yeux qui vont si loin

Sombrent des mots sans paroles

Et s’enrayent des refrains

Comme on ferme une corolle.

(« Le Veilleur » - 1984)

 

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UN  CRI  D’OISEAU

à Lise-Anne de L.

Dans mes bras je t’ai serrée,

Mais serrée à te briser,

Autour de nous la forêt

Figée se cristallisait.

C’était un après-midi

De Janvier endolori.

Le soleil vers les quinze heures

Etait vide et sans couleur.

Des corbeaux trouaient le ciel,

Pour qui étaient leurs appels

Tranchants comme des cisailles ?

Je couvais sous ton chandail

L’arrogance de tes seins.

Tes bras croisés sur mes mains

Tu soufflais « Oh ! Non j’ai froid »

Dans un plus cruel émoi

Je te serrais de nouveau

A te brise, mais l’étau

De mon corps s’amollissait

Chaque fois que je sondais

Tes yeux qui chauffaient mes yeux,

Tes yeux d’un lancinant bleu.

Des squelettes d’arbres noirs

Tout près appelait le soir.

In-qui-é-tant-tes questions

Toutes bardées de glaçons.

Présage de l’avenir

Elles nous faisaient frémir.

Un cri d’oiseau qui a faim

Se brisa dans le lointain.

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TOUT POUR LA FĖE !

 à Fabienne L.

Pour elle

       j’ai déclenché le plan Orphée

-mais pas hors de la Fée-

Surtout qu’il n’y ait pas d’autodafé !

Cela ne m’a pourtant pas empêché de crier :

        O ! Fée, O !  Fée

L’écho m’a répondu :

        aux fées !, aux fées !

Je lui ai répliqué :

       idiot il n’y a qu’une seule Fée !

Il a insisté : 

       «au fait ! Au fait !

Je lui ai lâché sec :

       c’est fait !

Alors il n’a plus rien dit du tout,

       non mais !

De Fée en aiguille, dis-je,

       ah ! J’ai ouvert un atelier « Tout pour la Fée ».

Il y règne un courant fébrile.

Ma plume accourt et court et court,

       mon cœur accourt et bat et tape.

Ah ! Ça je dois avoir  la fièvre…

On me disait tantôt :

       prenez donc de la Fébralgine !

J’ai répondu tout court et contre tous :

       ah oui ! C’est ça, pour que la Fée s’en aille… »

Et puis je me sens si fécond depuis la Fée.

Tout pour la Fée, tout pour la Fée ;

       à Dole tout comme à Gentilly !

Dimanche 29 Mars 1987 – (dans le TGV Paris-Lausanne).

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DES  MOTS  SAIGNĖS  POUR  TOI

pour Fanette.

 

Tu les auras tes vers d’amour, ma Clandestine,

Froid tu ne prendras plus à mendier dans les livres

Des mots saignés pour toi, rimes incarnadines

Qu’un jour tu appelais tendue sur moi, chagrine.

Je t’en cisèlerai d’ambre, d’airain, de cuivre,

Je t’en adouberai de fiers pour nous survivre.

Sur toi les gens diront : « Dieu ! Quelle a belle chance :

Lui, presqu’éteint, faut-il que vraiment fort il l’aime,

L’œil, la gorge noués sur son chemin d’errance ;

Pour l’éblouir de chants d’une telle fragrance ;

Faire carillonner Pâques en plein Carême ;

Eclater son désir en psaumes de blasphèmes

Et ne respecter rien qui ne soit son giron ! »

N’embrume plus tes yeux de ce voile d’ardoise

Lorsque l’hiver s’enlise au pied de ta maison,

Se glisse sous ta robe en de mâles frissons

Et marbre tes seins de frimas couleur framboise.

Réchauffe-toi de mon souvenir, ma Turquoise ;

Dors avec nos enfants-verbes conçus dans l’ombre,

Farfadets de ces nuits au doux muguet de Mai ;

Ces mille syllabes de feu, ces mille nombres ;

Qu’ils t’emmaillotent, qu’ils te lovent, qu’ils te sombrent

En leurs limbes sereines aux haleines de lait,

Ces rimes-nouveaux-nés filés à mon rouet !

Tu les auras tes vers d’amour, blanche Princesse,

Ils jailliront brûlants polyspermes de sang

Goutte-à-goutte de ma palette de caresses,

Lénifiant chaque soir ton acide tristesse

Quand je ne suis plus là, que vaine je t’attends ;

J’enfanterai des mots multiflores, changeants :

Un tapis de printemps émeraudant la plaine,

Mai qui chante un aria de fin d’après-midi,

Une abeille follette, une occulte halène,

Un vent trousse-jupon friselisant les chênes,

La mer adamantine, un ébat de courlis,

Enfin ce que je bois dans tes yeux assouvis.

Novembre 1979

Madrid (Espagne) Crédit photo : www.intermedes.com

 

SIMPLEMENTE…

                                    para Laura O.

El bosque;

La nieve;

El viento;

El cielo;

El canal;

La Otra Dimensión;

El despertador de la consciencia

Y el despertador

             del alma de mi similares;

Más lejos,

Una joven mujer

O una muchacha:

¡Tienes allí las razones

             de mi pluma!

Sábado 21 de diciembre de 2013

Mayence (Allemagne) - Crédit photo : www.internationalgreeter.org

HUMORAUFRUF  AN DIE  FEE  VON MAINZ…

für Dr. Christine Z.

Ein Stück Stern ist

               in mein Bett gefallen…

Aber es ist

               ein sehr, sehr, sehr

Kleines Stück Stern.

Glücklicherweise!

Weil es sonst ein Feuer

in meinem Bett entfach hätte!

Aber wo die Fee Christine

         sich versteckt?

In meinem letzter Brief

ich schrieb ihr

                   dass der Krieg von 39-45

beendet ist seit sehr langer Zeit…

Sie hat vielleicht nicht

                   meine Bemerkung toleriert

Aber wo die Fee Christine

         sich versteckt?

Und wenn ein Stück Stern

                   in ihr Bett fällt?...

Ein Stück Stern mit

                   meinem Namen

darauf?...

Ja, aber das kann

                   einen diplomatischen

                   Zwischenfall hervorrufen…

Was würde geschehen mit Deutschland?

Man würde alle Briefträger töten?

Würde es geben

                   einen Genozid aller Dichter?

Deshalb sage ich

                   unaufhörlich:

Aber wo die Fee Christine

        sich versteckt?

So schreiten wir

                 zum dritten Weltkrieg,

es wird ein Krieg der Sterne sein.

Stücke sehr, sehr, sehr

                 kleiner Sterne.

Glücklicherweise!

Sehr kleine Stücke

                 sehr kleiner Sterne.

Glückliescherweise!

Stücke sehr, sehr, sehr

                 kleiner Sterne

die in die Betten fallen werden.

Sagen Sie, was Sie wollen:

aber der Krieg ist dabei

                 sich zu vermenschlichen

und sogar

                 zu werden lyrisch.

Aber wo die Fee Christine

                 sich versteckt?

Die kleinen Stücke Sterne

                   fallen weiter.

Deshalb sage ich

           unaufhörlich:

Aber wo die Fee Christine

           sich versteckt?

Donnerstag, den 9 August 2007.

Birmingham (Royaume Uni). Crédit photo : www.gettymages.fr

 BALLADE  À JOHANNE

à Joanne L.

Tout à la fois jouteur, archer, jus-ti-ci-er,

Hal-le-bar-dier, bretteur et madré franc-tireur ;

J’éperonne mes mots vers de vastes curées.

Qu’importe si le sage honnit ma folle ardeur !

Je brûle mon chemin jusqu’au bout de mes heures.

Mais voici que paraît bel-le ré-mis-si-on,

Tendrement révérée au creux de ma douceur :

Capiteuse Joanne, incendie ma raison !

Je ne découvre pas la vérité ce soir ;

J’enlumine et polis ma romance d’hier.

Je n’ai pas toujours eu l’or de mon écritoire

Ni mon audace, ni mes dou-ces ma-ni-ères.

Timide et maladroit je vivais en hiver,

Mon esprit dut ainsi rechercher sa saison

Pour louer noblement sa pas-si-on première :

Capiteuse Joanne, incendie ma raison !

Ta main ouverte est la corolle de l’espoir.

Tu as des yeux avec lesquels je m’entends bien.

Ta lèvre est la fontaine où j’aimerais tant boire,

Elle est toute moirée de si troublants dessins.

Mes fleurs préférées sont les œillets de tes seins.

Demain je t’écrirai encor d’autres blasons.

Un sourire de toi me ferait magicien :

Capiteuse Joanne, incendie ma raison !

Princesse désormais, souvent vous m’entendrez

Fougeuseument chanter, clamer sur tous les tons

Cet air de troubadour, non de hal-le-bardier :

Capiteuse Joanne, incendie ma  raison !

___________

 

THAT  IS THE QUESTION…

to Miranda H.

Mandy is a very small bird

so fragile

so fragile.

Mandy is also wounded bird

so touching

so touching.

Is Mandy afraid of me?

I fear it!

I fear it!

If I put my hand on her:

hey! But what would then occur?

Hey! But what would then occur?

If I touch almost her lips

tenderly

tenderly;

If I press my lips on her

with fever

with fever:

then she would fly away twice…

Tuesday June 20, 2006.

Sousse (Tunisie). Crédit photo : www.voyageforum.com

LE LOUP DE NOUNOU

à Noujéiba B.-F

Nounou !

Hou ! Hou !

Je suis le loup.

Le loup d’ici le loup de là le loup d’Allah

           et le loup de qui tu voudras.

Je suis là le jour la nuit

           mais je ne nuis pas.

Un œil au tain de ton miroir je suis le loup.

Un œil au fond de ta baignoire je suis le loup.

Un œil au creux de ton peignoir je suis le loup.

Je ne hurle pas à la mort

           mais à l’Am

Hou ! Rentrons chez toi !

Manama : capitale du Bahreïn. Crédit photo : www.fr-academie.com

 

TRAVEL STOPPED . . .

To Layla A.-S.

Hello Layla

       close to the bottom of the world!

Hello Laylac

       close to the bottom of the waves!

Hello Layla

       close to the bottom of the waters!

Hello Layla

       close to the bottom of the light!

Hello Layla

       close to the bottom of the cloud!

Hello Layla

       close to the bottom of the page!

Hello Layla

       close to the bottom of the word!

Hello Laylac

       close to the bottom of the smile!

Hello Layla

       close to the bottom of the lips!

Hello Layla

       close to the bottom of the sigh!

Hello Layla

       close to the bottom of the bodice!

But now I stop the poem;

       yes, I do not have a passport

       to continue this voyage.

Or: diplomatic incident!

El Jadida (Maroc) Crédit photo : www.dreamstime.com

ACTION  DE  GRÂCE

à Siham E.

Je suis celui je suis peut-être le seul homme

                   au monde

                    à posséder six de tes photos toutes encadrées dans un très grand

                   cadre blanc.

Louis Aragon aima Elsa ;

                   moi j’aimerai

                   Siham.

Entre poètes il faut bien être solidaires…

Il est huit heures du soir passées d’une demi-heure ;

                 je veux jouer des mots pour toi comme l’on joue du saxo.

Siham si âme au monde  est d’un désir de toi aussi virulent que le mien;

                 alors je veux bien m’excuser et m’en aller aimer ailleurs…

Tu m’as demandé en mariage

                   et bien des hommes te demanderont en mariage.

Mais moi je n’ai rien demandé puisque c’est toi qui me demandes

                   en mariage.

Les autres hommes

                   donc

n’ont-ils  plus qu’à s’en aller aimer ailleurs ?

Oh ! Non je ne suis pas un saint

                 - ni un démon, du reste.

Je suis sain d’un désir terriblement humain

                  à  vouloir faire

                  rugir tes seins…

J’ai renié toutes les religions ne reliant plus les hommes à Dieu.

La religion primaire n’est que pâle invention des hommes

                   pour les diviser,

                   pour le faire s’entretuer.

Carême ou Ramadan : ok !

Mais l’amour de Dieu l’amour des hommes

                   bien avant ces formalités !

Je suis un ermite extraverti.

Tantôt ici si proche de mes semblables ;

                 tantôt là-bas jusqu’au fin fond de moi.

Mais je peux t’emmener bien aussi loin si tu le veux.

Tu as tant de temps devant toi ;

                 je te laisserai me capturer, et m’envoûter et m’arrimer à toi.

Marie-moi, peut-être, mais je te laisserai toujours sans laisse !

Un couple initiatique, nous pourrions être un couple hors du commun.

Que nous soyons même séparés pour mieux nous retrouver.

Que nous soyons même éloignés pour mieux nous mesurer.

Que nous soyons même chastes au fort de notre tour

                   afin de nous évader sur commande

                   pour nous unir

                   là ou bon nous réjouira

                   et  nous fera jouir…

Mais faisons déjà l’amour avec les mots.

Avec les mots qui ne parleront pas d’amour

                 mais qui seront d’amour.

Tu as vingt-deux ans et tu es irradiée d’amour ;

                 l’amour que tu sécrètes

                 -lancinante abeille-

L’amour que je t’injecte

                   au travers de mes pensées-désirs.

Nous sommes unis déjà pour le meilleur et sans  le dire…

Mademoiselle oui je ferai le Ramadan.

En action de grâce pour l’inouï présent divin

                   que m’a fait le Dieu Miséricordieux :

                    le désir que tous les hommes soient un sous son regard.

Sainte Eléonore. Crédit photo : www.dreamstime.com

« PETIT  ANGE »

 à Eléonore T.

 

Je t’appelle « petit ange »,

Mais sois aussi petit démon

              en jupon !

Et si je devenais ermite

              tu viendrais de nuit  hanter le cloître

              de ma solitude extravertie…

Je t’appelle « petit ange »

              mais je raffole de ton prénom « Eléonore ».

Je lui trouve un élan princier.

« Princesse Eléonore » qui en toi dort ?

Je t’appelle « petit ange »

              et tu volètes autour de mes pensées.

(Or songe qu’en un seul un jour

              le cerveau de l’homme peut produire soixante-mille pensées…)

Je conçois qu’il faille un petit ange pour alléger

               cette masse de matière grise encline à toujours cogiter.

Je t’appelle « petit ange »

              car tu me parais « vraiment bien » pour être finalement réelle…

Or tu existes et je n’ai pas rêvé

              dans ce long train de juin de Lyon jusqu’à Dijon.

Je t’appelle « petit ange »

              pour ta soif de spiritualité chrétienne.

Comme je comprends ta quête de l’Autre Dimension

              dans ce monde de robots,

               de machines,

              de morts-vivants de l’âme !

Je t’appelle « petit ange »

               alors que finalement je voudrais tant quitter

               cette terre des vivants

               -mais je ne suis pas prêt et même pas du tout présentable-

pour m’envoler aux ciels des cieux.

Je t’appelle « petit ange »

              car je viens d’enrayer l’engrenage de ma vie

              professionnelle.

À quoi bon ces plus de dix années d’une vie  robotique ?

Alors j’ai pensé « ça suffit »

              et suis parti vivre pour moi.

Je suis parti à Poligny près des Clarisses et de la collégiale.

Je suis parti en Saône-et-Loire pour manger des « corniottes »,

              apprendre à ne rien faire tout un long mois

               et « passer de la paille ». *

Je t’appelle « petit ange »

              car j’ai cassé les dents au temps.

J’ai gommé le passé et n’essaie plus d’entr’apercevoir le futur.

Le pouvoir du moment présent m’importe vraiment plus

              que le passé décomposé

              et le futur hypothétique.

J’ai revu la conjugaison des jours.

Je t’appelle « petit ange »

              car je me suis réconcilié avec la Reine de tous les Cieux.

               -J’ose d’ailleurs espéré qu’elle me pardonne

               de l’avoir souvent délaissée depuis ces dernières onze années.

O ! Gospa.

O ! Mater castissima .

J’apprends à redevenir celui que je fus avec Vous

               -avant ces près de dix années que je renie.

Je dois me retrouver le long de vos chemins

              -qui passent d’ailleurs par Poligny.

Je t’appelle « petit ange »

              car tu es la seule fille à laquelle je confie

              l’orage de mes révolutions.

Oh ! Certes, j’ai tant, tant, écrit

              pour tant de filles…

Mais toi mon petit ange Eléonore :

              tu peux être aussi pour moi petit démon

              en jupon…

*  » passer de la paille » : parler beaucoup.

Mercredi 18 août 2010 (Varennes-Saint-Sauveur, Saône-et-Loire)

Pages extraites de l'e-bookographie

www.nicolas-sylvain.jimdo.com

(Format PDF téléchargeable)

Le chant médiéval des Elfes.